Depuis juillet 2023, Empow’Her est coordinatrice du projet européen SEGIE (For a Social Economy that reduces Gender Inequalities in Europe), qui vise à utiliser l’économie sociale afin de réduire les inégalités de genre. En partenariat avec deux organisations italiennes (Action Aid Italia et Acube) et portugaises (NOVA Business School), Empow’Her souhaite à travers ce projet investiguer l’interconnexion entre économie sociale et égalité de genre.
Si de nombreux rapports ces dernières années ont souligné la nécessité d’une meilleure intégration des femmes et des minorités de genre dans l’économie sociale, il existe encore peu de données sur les interconnexions entre économie sociale et égalité de genre dans son ensemble, et sur l’impact du secteur sur l’autonomisation économique des femmes et des minorités de genre.
Comment les besoins des femmes sont pris en compte par les entreprises de l’économie sociale et solidaire, et comment ces dernières jouent un rôle en apportant des changements positifs dans leur vie ? C’est la question à laquelle l’étude menée par Empow’Her et ses partenaires tente de répondre.
Méthodologie
Cinq pays ont été sélectionnés pour l’étude afin de représenter la diversité européenne : l’Italie, la France, la Pologne, le Portugal et la Suède.
La première phase de l’étude a consisté en une revue de littérature, permettant ainsi d’investiguer le sujet et de revoir les thèmes clés, les questions et les conclusions tirées jusqu’à présent par les différents travaux de recherche. La revue de littérature a permis de choisir les hypothèses formulées et les définitions utilisées aux fins de l’étude ainsi que d’identifier les principaux défis auxquels les femmes sont confrontées de nos jours.
Les données relatives au sujet de l’étude étant très limitées ou incomplètes, un questionnaire a été produit afin de recueillir 100 réponses d’entreprises sociales en Europe, permettant de tirer des conclusions plus pertinentes sur la contribution de l’économie sociale à la qualité de vie des femmes et des personnes qui s’identifient comme des femmes. Les structures ont été contactées par mail leur demandant de contribuer au rapport en répondant au questionnaire. En cas de non réponse, un message sur LinkedIn a été envoyé et en cas d’absence de réponse, un ou deux autres mails de relance ont été envoyés. Au total, 333 structures de l’ESS ont été contactées et 62 ont répondu au questionnaire.
Enfin, pour compléter le questionnaire et aller plus loin dans les questions de recherches, 8 entretiens ont été conduits, avec au moins un.e représentant.e de chaque pays dans l’échantillon.
Challenges Identifiés
L’étude a mis en évidence un certain nombre de challenges à relever pour améliorer les conditions de vie des femmes et des personnes qui s’identifient comme des femmes. Si l’Europe est une région privilégiée avec une qualité de vie supérieure comparée au reste du monde, il existe encore des inégalités qui doivent être abordés afin de permettre à chacun⸱e, indépendamment de sa race, de son sexe, de son âge, de ses conditions physiques ou psychologiques, d’avoir accès à de bonnes conditions de vie.
Ainsi, des challenges ont été identifié pour chaque dimension qui constitue la qualité de vie :
- Santé et survie
- Les femmes font état d’un plus grand nombre de besoins médicaux non satisfaits en raison du coût et de l’éloignement des soins
- La violence physique et sexuelle touche encore un tiers des femmes dans le monde et en Europe
- La violence à l’encontre des femmes transgenres et l’absence de de soins de santé adéquats et spécialisés pour les femmes trans
- La santé sexuelle et reproductive est une préoccupation majeure dans le domaine de la santé des femmes, mais elle pose encore des problèmes en ce qui concerne la mortalité des femmes, l’accès à la contraception, les grossesses chez les adolescentes et l’augmentation du nombre de césariennes.
- Education
- Des déséquilibres dans les domaines d’études
- La participation à l’apprentissage tout au long de la vie
- Emploi
- L’emploi à temps plein et la durée des années de vie professionnelle sont plus faibles pour les femmes que pour les hommes
- Le revenu net moyen est plus faible pour les femmes que pour les hommes
- Les femmes sont sous-représentées dans les postes de direction, les conseils d’administration et les gouvernements
- Les femmes sont sous-représentées parmi les travailleur.euses indépendant.es et les entrepreneur.es
- Participation sociale
- Les femmes participent moins aux activités culturelles, de loisirs et de bénévolat
- Les raisons de la non-participation à ces activités révèlent un désavantage pour les femmes
- Ségrégation du marché du travail culturel
Principaux résultats
Compte tenu des défis identifiés, les résultats de l’étude indiquent que :
- 44% des entreprises sociales des pays étudiés contribuent directement ou indirectement à relever les principaux défis auxquels les femmes sont confrontées et contribuent donc activement à un changement positif dans leur vie.
- 31% des entreprises de l’économie sociale participant à l’étude contribuent directement à des causes féminines.
Les réponses au questionnaire ainsi que les entretiens ont notamment fait ressortir sept tendances au sein de l’économie sociale pour meilleure contribution à la qualité de vie des femmes :
- La mise en œuvre des mesures qui contribuent à une meilleure intégration des femmes sur le lieu de travail
- Les femmes assument davantage des postes de direction
- L’inclusion des femmes ne dépend pas du secteur
- Les femmes représentent la majorité des employé.es du secteur de l’économie sociale.
- Les principaux obstacles à l’augmentation de l’impact des organisations de l’économie sociale sur les femmes sont les contraintes budgétaires et les barrières sociales et culturelles.
- Une communication et action active sur le thème de l’égalité de genre
- La mise en œuvre de mesures visant à promouvoir la participation des femmes sur le lieu de travail
En conclusion
La prise en compte des besoins des femmes par les entreprises au sein de l’économie sociale européenne révèle un paysage à multiples facettes où diverses initiatives et stratégies contribuent à un changement positif dans la vie des femmes et des minorités de genre qui s’identifient comme des femmes. Dans différents secteurs, les entreprises reconnaissent de plus en plus l’importance de répondre aux besoins des femmes, non seulement en tant que consommatrices, mais aussi en tant que salariées, cheffes d’entreprise et contributrices au développement social et économique. L’économie sociale européenne, qui englobe un large éventail d’entreprises ayant une mission sociale ou environnementale, joue un rôle crucial et pionnier dans la promotion de pratiques inclusives et durables qui ont un impact direct sur la vie des femmes.
Les entreprises adaptent leurs produits et services pour répondre aux divers besoins et préférences des femmes. Cette évolution reflète une prise de conscience croissante du potentiel sous-exploité des femmes et des autres minorités de genre en tant que consommatrices, professionnelles, éducatrices, patientes, étudiantes et actrices de la société. Toutefois, certains défis sont complexes et nécessitent non seulement des incitations gouvernementales, mais aussi du temps pour changer les mentalités et les stéréotypes dans la société, comme c’est le cas pour certains défis dans le domaine de la santé ou de l’éducation.
Retrouvez l’étude en intégralité ici